vendredi 16 septembre 2011

16 septembre : Massacre de Sabra et Chatila


Le massacre de Sabra et Chatila (deux camps de réfugiés palestiniens de Beyrouth-Ouest au Liban) a été perpétré, du 16 au 17 septembre 1982, par les phalangistes libanais dirigés par Elie Hobeika, dans un secteur "sécurisé" par l'armée israélienne depuis l'Opération Paix en Galilée. Le nombre de victimes varie suivant les sources entre 700 et 3 500. La commission Kahane, chargée par le gouvernement israélien d'enquêter sur le massacre, a établi que si les tueries n'ont été le fait que des seuls Phalangistes, la conduite de la campagne militaire israélienne était fautive et que certaines personnalités politiques israéliennes dont le ministre de la Défense de l'époque, Ariel Sharon, avaient une « responsabilité personnelle » dans les événements du fait de sa non-action durant ces massacres. Elie Hobeika, responsable présumé du massacre, a néanmoins, peu de temps avant sa mort, mis en cause Ariel Sharon et des forces spéciales de Tsahal en tant qu'organisateur et acteurs du massacre comme l'avait déjà fait en 1982 la Commission indépendante menée par Sean McBride.

Des camps de réfugiés palestiniens existent au Liban depuis la fin de la première guerre israélo-arabe en 1949, notamment les deux camps contigus de Sabra et de Chatila dans une banlieue de Beyrouth-Ouest. La population pauvre de ces deux quartiers grossit avec l'arrivée de Palestiniens et de Chiites fuyant les combats au Sud. L'Organisation de libération de la Palestine s'est implantée au Liban après le massacre de Septembre noir qui a poussé ses dirigeants à quitter la Jordanie. L'OLP utilise le sud du Liban comme base pour mener des attaques contre Israël qui répond en bombardant des positions de l'OLP au Liban Sud. Les premières attaques palestiniennes contre les phalanges libanaises commencent en avril 1975 : l'attentat de Ayin-el-Remmaneh marque le début de la guerre du Liban. Des Palestiniens tentent d'assassiner Pierre Gemayel alors qu'il inaugurait une église dans la banlieue de Beyrouth. Les tensions ne cessent d'augmenter entre musulmans et chrétiens jusqu'à l’assassinat, le 14 septembre 1982, du président élu du Liban, Bachir Gemayel, son fils, lors d'un attentat. Habib Tanious Chartouni, militant pro-palestino-syrien du Parti social nationaliste syrien (PSNS), est accusé de l'assassinat et emprisonné.

De 1975 à 1990, le Liban connaît une guerre qui oppose des groupes armés différents alliés à des pays étrangers de la région. Les Chrétiens maronites, d'abord alliés à la Syrie, s'allient ensuite à Israël, qui leur fournit armement et formation pour combattre les factions de l'OLP. Israël soutient également l'Armée du Liban Sud de Saad Haddad depuis 1978. Des massacres ont lieu lors des affrontements de ces groupes, notamment le massacre de Damour, le 20 janvier 1976 (750 chrétiens tués par l'OLP), le massacre de Chekka et le premier massacre du Mont-Liban dirigés par l'OLP contre des populations maronites, tandis que le Massacre de Karantina en janvier 1976 et le Massacre de Tel al-Zaatar en août 1976 sont tous deux dirigés par les Phalangistes contre des camps palestiniens. La guerre civile dans son ensemble a fait 100 000 victimes au Liban. La tentative d'assassinat sur l'ambassadeur israélien à Londres, Shlomo Argov, le 4 juin 1982, fournit un casus belli (bien que la tentative d'assassinat se révélera ultérieurement comme étant organisée par le groupe Abou Nidal "Sabri al Banna") qui transforme les hostilités entre Israël et l'OLP en une guerre à grande échelle. Le 6 juin, Israël envoie 60 000 soldats envahir le Liban. Cet acte est condamné par le Conseil de Sécurité de l'ONU.

Un cessez-le-feu est obtenu par l'administration américaine après deux mois de siège de la capitale libanaise. Le Plan Habib est proposé le 20 août 1982 par le département d'État américain et un accord est signé à la fin du mois d'août : des forces internationales doivent superviser l'évacuation de la ville par les forces de l'OLP et Israël accepte de ne pas avancer davantage vers Beyrouth tandis que des combats continuent à opposer les belligérants dans la plaine de la Bekaa. Le 23 août 1982, Bachir Gemayel, soutenu par les Phalangistes, est élu président du Liban par l'Assemblée nationale. Israël le perçoit comme un contre-poids à l'OLP au Liban. À la demande américaine, les Palestiniens hâtent leur départ, achevé le 1er septembre. Le surlendemain, Israël enfreint les accords de cessez-le-feu et se déploie autour des camps de réfugiés. Les forces internationales franco-italo-américaines, qui surveillaient le départ de l'OLP et étaient garantes de la sécurité des populations civiles des zones évacuées, se retirent le 11 septembre. Le lendemain, le ministre de la Défense israélien Ariel Sharon communique l'estimation de l'armée israélienne selon laquelle il resterait 2 000 combattants de l'OLP à Beyrouth. Cette déclaration est contestée par les Palestiniens.

Le Premier ministre israélien Menahem Begin s'entretient avec Bachir Gemayel à Nahariya et propose la signature d'un traité de paix. Gemayel, qui doit composer avec les intérêts de factions rivales au Liban, craignant une guerre civile, choisit de refuser la paix face à la pression des activistes de l'OLP restés dans les camps de Beyrouth. Le 14 septembre 1982, Bachir Gemayel est assassiné lors d'un attentat à la bombe qui détruit la totalité de ses bureaux. Le soupçon se porte sur Habib Tanious Chartouni, militant pro-palestino-syrien. Les Palestiniens et les dirigeants musulmans nient toute implication. L'armée israélienne répond à l'assassinat de leur allié en investissant Beyrouth-Ouest dès le lendemain, contrairement à son accord avec les Américains qui s'étaient engagés par écrit à protéger les musulmans de l'ouest de la ville. 88 morts et 254 blessés sont dénombrés dans ces affrontements. Israël justifie ce redéploiement pour maintenir l'ordre et la stabilité après le décès du président libanais. Toutefois, Ariel Sharon déclarera plusieurs jours plus tard à la Knesset : notre entrée dans Beyrouth-Ouest était destinée à détruire l'infrastructure laissée par les terroristes. L'armée israélienne réalisa alors le désarmement des milices anti-israéliennes de Beyrouth-Ouest, tandis que les Phalangistes conservaient leur armement.

Le 16 décembre 1982, le massacre est déclaré « acte de génocide » par l'Assemblée générale des Nations-Unies par 123 voix pour, 0 contre et 22 absentions. Bien que tous les délégués qui prennent part au débat sont d'accord sur le fait qu'un massacre s'est bien produit, son caractère génocidaire, ou les compétences de l'Assemblée pour caractériser un événement comme tel, sont remis en question par plusieurs d'entre eux. Selon William Schabas, « le terme génocide (...) a à l'évidence été choisi pour embarrasser Israël plutôt que par véritable soucis de précisions légales ».

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