samedi 17 septembre 2011

17 septembre 1978 : Signature des accords de Camp David


Le président égyptien Anouar El Sadate et le Premier ministre israélien Menahem Begin sont réunis par le président des Etats-Unis Jimmy Carter à Camp David, dans le Maryland. Après treize jours de négociation, les discussions débouchent sur la signature d'un "accord-cadre sur la conclusion de la paix entre l'Egypte et Israël". Les Israéliens se retirent du Sinaï trois mois plus tard permettant ainsi la reprise des relations diplomatiques entre les deux pays.
À sa prise de fonction le 20 janvier 1977, le Président Jimmy Carter souhaita relancer le processus de paix au Proche-Orient qui avait peu évolué à cause de la campagne électorale américaine de 1976. Suivant les conseils de la Brookings Institution, Carter décida d'opter pour une nouvelle approche de discussions multipartites plutôt que pour l'habituelle tradition diplomatique américaine d'envoyer des émissaires dans la région, à la façon d'un Henry Kissinger après la Guerre de Kippour de 1973. Ainsi, Carter souhaita inclure une délégation palestinienne dans les négociations dans l'espoir de trouver une solution finale et globale. À la fin de la première année de l'administration Carter, le Président avait déjà rencontré Anouar el-Sadate pour l'Égypte, Hafez el-Assad pour la Syrie et Yitzhak Rabin pour Israël. Carter souhaitait partir de la conclusion de la Conférence de Genève de 1973 pour relancer le processus de paix en demandant à Israël de se retirer de tous les territoires conquis sur chacun des fronts, et notamment en Cisjordanie. La situation politique en Israël changea avec l'élection de Menahem Begin et d'un gouvernement Likoud (Droite israélienne) en mai 1977. Begin semblait plus favorable que les travaillistes qui s'étaient succédé au pouvoir depuis 1948, pour reprendre les termes de la conférence de Genève. Il n'était pas opposé à l'idée de rendre le Sinaï à l'Égypte, ni à discuter avec des interlocuteurs palestiniens, mais il préférait (tout comme Sadate) des discussions bilatérales, et surtout il était très ferme sur son refus de perdre le contrôle de la Cisjordanie.

Le Président Sadate partait du principe que la conférence de Genève n'avait abouti à rien de solide, étant donnés les désaccords avec la Syrie. Il ne croyait plus en la pression américaine sur Israël et entreprit secrètement la démarche de rencontrer les Israéliens. En novembre 1977, sans même prévenir les Américains, Sadate annonça qu'il était prêt à se rendre à Jérusalem pour entreprendre des négociations avec les Israéliens. Il devint ainsi le premier dirigeant d'un pays arabe à rendre une visite officielle à Israël, reconnaissant ainsi implicitement son existence. Les motivations de Sadate étaient d'ordre économique (l'aide des États-Unis à une économie égyptienne en mauvaise posture .Le Rais manifestait son intention d'entrer directement en dialogue avec les israéliens, cassant ainsi le tabou et bravant la communauté arabe. C'est pour cela que plusieurs émissaires arabes se sont rendus au Caire dans l'espoir de le convaincre de revenir sur sa décision. Or selon Mohamed Hasnine Haykal rédacteur en chef du quotidien Al Ahram et très proche du cercle du pouvoir (dans son livre La guerre de 1973 il écrivait : Saddate répétait à qui veut l'entendre que « les autres ne veulent pas entrer dans la modernité » c’est-à-dire qu'ils ne veulent pas s'ouvrir au monde occidental). Ainsi sa distanciation des positions arabes n'est pas motivée par un quelconque encouragement à négocier bilatéralement ou à résoudre le problème palestinien, mais elle peut être interprétée comme une détermination ayant pour objectif principal l'acquisition d'une protection musclée nécessaire à son maintien au pouvoir. Les multiples correspondances entre les USA et Le Caire, suivies de visites de Henry Kissinger ne laissaient aucun doute qu'il s'agissait bien d'une transaction plutôt que d'une volonté délibérée tendant à résoudre le problème régional dans sa globalité. Begin avait de son côté tout intérêt à voir favorablement une telle démarche car cela permettait de traiter bilatéralement et sur un pied d'égalité avec le plus puissant des pays arabes.

Les deux dirigeants se rendirent du 5 au 17 septembre 1978 à Camp David, avec leurs équipes de négociateurs (dont Aharon Barak, futur président de la Cour suprême israélienne) et avec l'idée des concessions qu'ils étaient prêts à faire. Les discussions furent tendues mais Carter refusa de laisser partir les négociateurs sans qu'ils soient parvenus à un accord. Plusieurs fois, chacun des deux partis a voulu quitter les négociations mais ils furent retenus par le Président Carter. Il fit la navette entre Begin et Sadate qui refusaient de traiter directement ensemble. L'impasse sembla définitive au dixième jour, à propos du retrait des implantations israéliennes de la péninsule du Sinaï et du statut de la Cisjordanie. Pour sauver les discussions, Carter choisit de défendre la position de Sadate sur le Sinaï et la position de Begin sur la Cisjordanie. Les discussions aboutirent finalement aux Accords de Camp David.

Il y eut deux accords-cadres de Camp David en 1978.

Le premier accord fixait un cadre pour la paix au Proche-Orient et comportait trois parties:

 la première partie, qui devait poser les principes des futures négociations sur le sort de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza, aurait dû déboucher sur une autonomie transitoire de cette nouvelle entité, dans le respect de la Résolution 242 (1967). Elle a été jugée moins claire que le second accord et fut plus tard interprétée différemment par Israël, l'Égypte et les États-Unis. Elle ne sera ainsi jamais appliquée.

 la seconde partie était un préambule au second accord, concernant les relations diplomatiques entretenues entre Israël et l'Égypte.

 la troisième partie déclarait certains principes qui auraient dû s'appliquer aux relations entre Israël et les autres pays arabes. Elle resta lettre morte.

C'est le second accord qui concernait la conclusion d’un traité de paix entre les deux pays dans les six mois suivants. Celui-ci fut signé le 26 mars 1979 à Washington et permit à l’Égypte de récupérer le Sinaï en 1982 après le retrait complet de l'armée israélienne et le démantèlement de certaines implantations juives comme à Yamit. En contrepartie, Israël obtint une normalisation des relations diplomatiques israélo-égyptiennes et des garanties sur la liberté de circulation sur les voies d'eau du canal de Suez et du détroit de Tiran. L'accord concernait également les forces militaires, que chacun des pays était disposé à ne plus rassembler près de la frontière. Israël offrit également une garantie de libre passage de l'Égypte vers la Jordanie.

Les accords et le traité de paix furent accompagnés de lettres de compréhension mutuelle des Américains, des Égyptiens et des Israéliens.

Les conséquences :

Menahem Begin et Anouar el-Sadate reçurent le Prix Nobel de la paix en 1978.
La perception que les Arabes avaient de l'Égypte changea après la signature de ces accords. L'Égypte, qui avait porté le leadership parmi les pays arabes à l'époque de Nasser, se retrouva isolée pour n'avoir pas mis davantage en avant les intérêts arabes. Notamment, il fut reproché à Sadate de ne pas avoir obtenu de concessions israéliennes sur la reconnaissance des droits des Palestiniens à l'autodétermination. La haine fut entretenue jusqu'à entraîner l'assassinat de Sadate en 1981. L'Égypte fut également exclue de la Ligue arabe de 1979 à 1989. L'unité arabe contre Israël fut brisée à la suite de ces accords. En Irak, Saddam Hussein tenta de remplir le vide laissé par la perte du leadership égyptien. Certains observateurs expliquent ainsi la raison de l'invasion de l'Iran après 1980. Surtout, les Accords de Camp David démontrèrent aux pays arabes, qu'il était possible de négocier avec Israël. La Conférence de Madrid de 1991, les Accords d'Oslo de 1993 et plus tard le sommet de Camp David II en 2000 n'auraient probablement jamais eu lieu sans ce précédent.

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