mercredi 24 août 2011

La force de dissuasion française


Le 24 août 1968,  la France devient la 5ème puissance nucléaire.
     
La première bombe H (bombe thermonucléaire ou à hydrogène) française explose à 600 mètres au-dessus de l'atoll de Fangataufa, dans le Pacifique. Sa puissance équivaut à 170 fois celle d'Hiroshima. Les Etats-Unis avaient fait explosé la première bombe H, issue des recherches effectuées à partir de la bombe A, en 1952, suivis de l'URSS en 1953, de la Grande-Bretagne en 1957 et de la Chine en 1967. En 1998, l'Inde et le Pakistan deviendront les sixième et septième puissances nucléaires.
Petite histoire de la force de dissuasion française :
L'histoire de la Force de dissuasion nucléaire française, aussi nommée Force de frappe, commence officiellement en 1958, pendant la Guerre froide, lorsque Félix Gaillard, premier ministre sous la présidence de René Coty, décide de doter la France d'une force de dissuasion nucléaire.
La base de la doctrine française est la volonté de conférer à l’arme nucléaire un rôle fondamentalement politique. Il s’agit « d’empêcher la guerre » : l’arme nucléaire ne saurait être un moyen de coercition ou une « arme d’emploi », c’est-à-dire une arme utilisable au même titre que les autres. Mais il s’agit également de pouvoir affirmer, sur la scène internationale, que la France ne dépend d’aucune autre puissance pour ce qui est de sa survie.
C'est avec l'ordonnance 45-2563, du 18 octobre 1945 (presque trois mois après l'explosion des bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki), signée par le général de Gaulle, qu'est créé le Commissariat à l'énergie atomique (CEA). Cet établissement a pour mission d'effectuer des « recherches scientifiques et techniques en vue de l'utilisation de l'énergie atomique dans les divers domaines de la science, de l'industrie et de la défense nationale ». Les forces françaises eurent l'occasion de s'exercer au maniement d'armes nucléaires avec des armes tactiques américaines dans le cadre de l'OTAN sous double clefs dans les années 1950 et 1960. La 11e escadre de chasse équipé de North American F-100 Super Sabre de l'armée de l'air française entre 1963 et 1964, les divisions mécanisées modèle 59 qui avaient 2 batteries de 2 MRG-1 Hornest John, et 8 batteries de missile sol-air MIM-14 Nike-Hercules armées par les 520e et 521ème Brigade d’Engins des Forces françaises en Allemagne dans le Bade-Wurtemberg de 1960 à 1966. Après l'échec de la Communauté européenne de défense, dont le traité impliquait que la France renonçât au nucléaire, mais qui fut refusé par l'Assemblée nationale le 30 août 1954, le président du Conseil Pierre Mendès France signe le 26 octobre 1954 le décret instituant une Commission supérieure des applications militaires de l'énergie atomique et, le 4 novembre, un arrêté créant au sein de celui-ci un Comité des explosifs nucléaires présidé par le général Jean Crépin avec comme secrétaire et rapporteur le professeur Yves Rocard, démarrant officiellement le programme nucléaire militaire français.
En 1959 est créée la Société pour l'étude et la réalisation d'engins balistiques (SEREB), le mandataire de l'État et maître d'œuvre des futurs systèmes d'armes de la Force nucléaire stratégique (FNS). Un an plus tard, la SEREB collabore avec les sociétés Nord-Aviation et Sud-Aviation et établit les programmes des « Études balistiques de base » (EBB), dits des « Pierres Précieuses ». Ils sont destinés à acquérir les technologies nécessaires à la réalisation de la FNS. C'est aussi en 1959 que le premier bombardier Mirage IV, construit par Dassault, est présenté en vol au général de Gaulle lors du salon du Bourget, à peine trois années après la signature du projet. Et le 13 février 1960 a lieu le premier essai français d'une bombe A à Reggane, dans le Sahara algérien. Suivi en 1961 par l'essai en vol de la fusée AGATE, première de la série des « Pierres Précieuses » au Centre d'essais d'engins spéciaux créé le 24 avril 1947 à Colomb-Béchar en Algérie française. En 1963, le gouvernement français opte pour la réalisation de deux nouveaux systèmes d'armes, terrestre et naval, avec :  des missiles sol-sol à tirer d'un silo : le SSBS; des missiles mer-sol à tirer d'un sous-marin à propulsion nucléaire : le MSBS.
L'année 1964 marque le début de la permanence de la dissuasion nucléaire française. En effet, le 14 janvier, les Forces aériennes stratégiques sont créées. En février, le premier Mirage IV et le premier avion ravitailleur Boeing C-135 arrivent dans les forces. En octobre, la première prise d'alerte par un Mirage IV, armé de la bombe AN-11, et un avion ravitailleur C-135F a lieu sur base aérienne de Mont-de-Marsan (40). La triade arme nucléaire, avion vecteur et avion de projection est alors opérationnelle. Au printemps 1966, avec 9 escadrons de Mirage IV, l'ensemble de la 1ere composante de la force de dissuasion est réalisée.
Le 24 août 1968 a lieu le premier essai d'une bombe H, sur l'atoll de Mururoa dans l'océan Pacifique. Les États-Unis partagent secrètement le dispositif de sécurité et d'armement avec la France dans les années 1970. La première unité opérationnelle de la Base aérienne 200 Apt-Saint-Christol sur le plateau d'Albion est mise en service le 2 août 1971 avec 9 SSBS S2, la seconde le 23 avril 1972.
Le 1er décembre 1971 entre en service le sous-marin nucléaire lanceur d'engins (SNLE) Redoutable.
En octobre 1972, deux escadrons de Mirage IIIE de la 4e escadre de chasse de la forces aérienne tactique (FATac) se voient confier la mission nucléaire tactique avec l’arrivée de la bombe AN 52.
En 1973, 60 Mirage IV répartis sur 9 bases sont désormais en alerte.
                 
Le 1er mai 1974, le premier des 5 régiments de missiles Pluton entrent en service dans l'armée de terre française. Le 1er octobre 1974, 2 escadrons de SEPECAT Jaguar de la 7e escadre de chasse sont déclarée officiellement nucléaire tactique. Ils seront rejoints dans cette mission par un troisième escadron le 1er janvier 1981. Un escadron abandonnera ce rôle à partir du 31 juillet 1989 suivi par les 2 derniers le 31 août 1991. Le 10 décembre 1978, le porte-avions Clemenceau reçoit, suite à une IPER, la qualification nucléaire : un local spécial pour l'embarquement de quatre ou cinq armes nucléaires AN-52 pouvant être utilisé par les Super-Étendard de la Marine nationale y était aménagé; entre 1980 et 1981, c'est le Foch qui est à son tour aménagé dans cette fonction pour une prise opérationnelle de service le 15 juin 1981.
Durant les années 1980, la Force de frappe atteint son maximum avec plus de 500 ogives nucléaires. Le Bulletin of the Atomic Scientists annonçant un pic de 540 ogives en 1992 et un total de 1 260 armes construites depuis 1964 :
Six SNLE basés à l'Île-Longue dans la rade de Brest emportant 384 têtes sur 64 missiles MSBS. En novembre 1987, les SNLE représentent une puissance de destruction de 44 mégatonnes ;  18 missile S3 basés sur la base aérienne 200 Apt-Saint-Christol au plateau d'Albion dont la première unité opérationnelle a été mise en service le 1er juin 1980 et la seconde le 31 décembre 1982;  30 missiles Pluton dans 5 régiments d'artillerie de l'Armée de Terre, le missile Hadès devait le remplacer ;  une soixantaine de missiles air-sol ASMP et de bombes nucléaires pouvant être utilisés par les Mirage IV (34 en ligne en 1983), Mirage 2000N, Dassault Jaguar de l'Armée de l'air et les Super-Étendard de la Marine nationale.
Le 11 septembre 1991, le Président de la République annonce le retrait anticipé des missiles Pluton dont les derniers seront retirés  le 31 août 1993. Le 8 avril 1992, le président François Mitterrand annonce la mise en place d'un moratoire sur les essais nucléaires. Le 13 juin 1995, nouvellement élu, le président Jacques Chirac annonce que huit essais nucléaires auront lieu de septembre 1995 à janvier 1996. Ces essais ont pour but de récolter assez de données scientifiques pour simuler les futurs essais. Une vague de contestation internationale a lieu. Le 29 janvier 1996, dans un communiqué, la présidence annonce, après le sixième essai (qui a eu lieu le 27 janvier sur l'atoll de Fangataufa en Polynésie) sur les huit prévus à l'origine, que la France met fin aux essais nucléaires. Avec ce dernier tir, c'est 210 explosions qui ont été réalisées par la France depuis l'acquisition de l'arme atomique en 1960. Suite à la fin de cette dernière campagne de tests, la France signe le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE) le 24 septembre et démantèle ses installations de tests dans le Pacifique. Le Parlement ratifie le TICE le 6 avril 1998, engageant ainsi la France à ne plus jamais réaliser d'essais nucléaires. En 1996, les 18 silos de missiles sol-sol du plateau d'Albion dans le Vaucluse sont désactivés.
Au début du XXIe siècle, les tests grandeurs nature ne sont plus effectués. Les missiles sont modélisés en laboratoire.

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