Introduction :
La décolonisation a été l’un des faits majeurs de
l’après-guerre. Elle a engendré la plupart des États du Tiers-Monde. Mais cette décolonisation a-t-elle profité à ces
Etats ?
C’est ce que nous allons voir en s’intéressant tout d’abord
à ses causes, puis en étudiant les évènements qui ont conduit à l’émergence du
1/3 Monde.
I. Les causes de la décolonisation
A. La colonisation
Elle a déséquilibre des économies et des sociétés
traditionnelles : ruine des artisans concurrencés par les industriels de la
métropole rupture du cadre tribal et urbanisation anarchique (bidonvilles) ;
explosion démographique due aux vaccins et aux progrès de l’hygiène.
Elle a dégagé de nouvelles élites rejetées de l’«
establishment » : local étudiants
venus s’instruire dans les universités européennes, syndicalistes, militants
socialistes ou communistes, comme par exemple, Hô Chi Minh au Nord-Viêt Nam.
Elle a entraîné des rancoeurs à l’égard des colons :
populations chassées de leurs terres, toujours reléguées à un rôle subalterne,
chômage, humiliations diverses.
B. La Seconde Guerre
mondiale
Les défaites rapides des métropoles en difficulté
(Royaume-Uni) ou envahies (France, Belgique, Pays-Bas. Italie) et de leurs
troupes coloniales devant les Japonais ont porté un coup sévère au prestige des
pays colonisateurs : Royaume-Uni en Birmanie et en Malaisie, France en
Indochine, Pays- Bas en Indonésie, Belgique au Congo belge (république
démocratique du Congo, ex-Zaïre).
La charte de l’Atlantique (1941) présente les Anglo-Saxons
comme les champions de la liberté et du droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes.
Peuvent-ils, une fois vainqueurs, refuser ce droit aux
peuples colonisés
Les colonies fournissent des soldats aux métropoles ; leur
sacrifice ne mérite-t-il pas une contrepartie? Dès 1942, le parti du Congrès (Inde)
réclame la fin du statut colonial.
C. Des forces nouvelles
hostiles au colonialisme
• L’ONU, créée en 1945 à San Francisco et dont la charte
insiste sur le droit des peuples à un gouvernement autonome, et où s’expriment
les leaders des pays récemment émancipés Nehru, Sukarno...
• L’URSS, qui envoie armes et argent aux mouvements
indépendantistes de tous les continents.
• Les États-Unis, qui donnent l’exemple en émancipant les
Philippines acquises sur l’Espagne vers 1900 et qui encouragent la décolonisation
là où ils pensent qu’elle barrera la route aux communistes (Indonésie,
Indochine), mais dont l’attitude est ambiguë après la guerre de Corée par
crainte de voir l’indépendance déboucher sur des régimes communistes (au Viêt
Nam par exemple).
• La Chine ,
devenue communiste en 1949, qui parraine certains mouvements de libération
comme celui des Khmers rouges au Cambodge.
II. Les deux vagues de décolonisation: en Asie, puis
en Afrique
A. Les indépendances au
Proche-Orient
1. La fin des mandats français en Syrie et au Liban
Ces territoires avaient été confiés à la France par la SDN. En 1945, après des
troubles violents, la Syrie
et le Liban en appellent à l’ONU, et, en 1946, la France se retire de la
région.
2. La naissance de l’État d’Israèl
Comme les Français, les Britanniques avaient obtenu des
mandats (en Irak, en Palestine et en Transjordanie). Dès 1930, l’Irak avait
accédé à l’indépendance. En 1945 la
Ligue arabe (7 États) est créée avec le soutien des
Britanniques, et l’année suivante la Jordanie devient indépendante. La Palestine est alors
peuplée de 1 200 000 Arabes et de 560 000 Juifs. Le projet de créer un État
juif en Palestine est renforcé par le choc créé par le génocide mais les
Britanniques s’y opposent, pour ne pas mécontenter leurs alliés arabes, et la
lutte armée se développe. Incapables d’y faire face, ils s’en remettent à l’ONU
qui décide de diviser la
Palestine en deux États. Tandis que les Britanniques se
retirent, David Ben Gourion proclame la naissance de l’État d’Israél. Immédiatement,
les armées de la Ligue
arabe attaquent. Le cessez-le-feu de février 1949 met fin à cette première
guerre israélo-arabe au profit du nouvel Etat israélien qui s’agrandit. 900000
Palestiniens se réfugient dans des camps situés dans les pays voisins. C’est le
début du problème palestinien.
B. En Asie.
1. L’indépendance de l’empire des indes
La revendication est ancienne (action de Gandhi). Dès 1945,
les travaillistes britanniques entament des négociations qui buttent sur la
question de la partition : le parti du Congrès de Gandhi et Nehru souhaite
conserver l’unité de l’inde, et les musulmans dirigés par Jinnah veulent fonder
un État indépendant, le Pakistan. C’est cette dernière solution qui est retenue
: le 15 août 1947 le Pakistan, composé de deux parties séparées par 1 700 km , et l’Union
indienne accèdent à l’indépendance. Des troubles éclatent alors.
La même année, Ceylan et la Birmanie l’obtiennent
également ; la Malaisie
doit attendre 1957.
2. L’indépendance des Indes néerlandaises (Indonésie)
Dès le départ des Japonais, Sukarno proclame l’indépendance.
Les Pays- Bas envoient un corps expéditionnaire en 1946 sous la pression de
l’ONU et des États-Unis, ils doivent négocier, et l’indépendance est acquise en
1949.
3. L’Indochine
Après le départ des Japonais en septembre 1945, Hô Chi Minh
proclame l’indépendance de la république démocratique du Viêt Nam. Elle est
d’abord reconnue par la France
qui change ensuite de position. Le bombardement du port d’Haïphong est le point
de départ de la guerre qui se poursuit jusqu’à la défaite française de Diên
Biên Phu en mai 1954. En juillet de la même année, les accords de Genêve
divisent provisoirement le Vièt Nam en deux États. L’indépendance du Laos et du
Cambodge est acquise en même temps.
C. En Afrique.
1 . L’Afrique du Nord
En Algérie, seule colonie française de peuplement, les
colons, pour la plupart, refusent toute réforme.
L’insurrection de la Toussaint 1954 marque le début de la guerre.
Malgré un engagement croissant de l’armée, les gouvernements successifs ne
parviennent pas à régler la crise. À la suite de l’insurrection algéroise de
mai 1958, de Gaulle revient au pouvoir en France et enclenche un long processus
qui conduit à la paix, tout en poursuivant la lutte sur le terrain. En mars
1962, les accords d’Évian reconnaissent l’indépendance de l’Algérie, proclamée
en juillet.
2. L’Afrique noire
En Afrique noire française, la démarche vers l’indépendance
a été progressive et pacifique. En 1956, la loi-cadre Defferre permet une
évolution vers l’autonomie des territoires. En 1958, tous acceptent (sauf la Guinée ) d’intégrer la Communauté française
proposée par de Gaulle, et en 1960 la
France reconnaît leur indépendance.
La décolonisation britannique démarre en Afrique
occidentale. L’émancipation du Ghana sert de modèle aux autres colonies
d’Afrique Nigeria, Kenya...
L’indépendance du Congo belge, en 1960, est suivie de
violences : la sécession de la riche province du Katanga débouche sur une
guerre civile dont le général Mobutu sort vainqueur en 1965.
Le dernier empire colonial à disparaître est celui du
Portugal. Le Mozambique, la
Guinée-Bissau , l’Angola n’accèdent à l’indépendance qu’en
1975, après une longue période de guérilla.
III. L’émergence du Tiers-monde
A. Naissance du Tiers-monde
et non-alignement
En 1955, la conférence de Bandung réunit 29 États d’Asie et
d’Afrique pour la plupart récemment décolonisés. La résolution finale condamne
le colonialisme et défend la non-ingérence dans les affaires intérieures de
chaque État ainsi que le respect des droits de l’homme.
Réunis à Belgrade en septembre 1961, 25 États manifestent
leur rejet de toute alliance avec l’Est ou l’Ouest et fondent le Mouvement des
non-alignés. Au cours des années suivantes, le Mouvement s’élargit (plus de 100
membres au milieu des années 80). L’ONU devient une nouvelle tribune du
mouvement avec l’entrée massive des nouveaux pays décolonisés. Mais cette
troisième force apparaît bien fragile car il est difficile pour ces jeunes
États de ne pas se lier à une grande puissance afin d’obtenir une aide
économique ou militaire.
B. Le Tiers-monde divisé
1. Par la multiplication des confits armés.
Dès les années 60 entre l’Inde et le Pakistan ; ou dans les
années 70 entre le Cambodge et le Viêt Nam, l’Iran et l’Irak... Les guerres
civiles sont également nombreuses, surtout en Afrique.
2. Par la diversité des situations économiques.
Le décollage économique des NPI d’Asie, la richesse de
certains États pétroliers du Moyen-Orient contrastent avec l’appauvrissement
croissant de nombreux pays d’Afrique.
C. Échec de l’instauration
d’un nouvel ordre économique mondial
En 1964 se réunit à l’initiative de 75 pays d’Asie,
d’Afrique et d’Amérique latine la première conférence des Nations unies sur le
commerce et le développement (CNUCED). Elle a lieu ensuite tous les quatre ans
sans grand succès et en 1974, sous la pression des représentants du
Tiers-monde, une assemblée extraordinaire des Nations unies adopte un programme
d’action relatif à l’instauration d’un nouvel ordre économique international
dont les résultats vont s’avérer bien faibles à cause de la résistance des pays
du « Nord » et des divisions de ceux du « Sud ».
Les conférences Nord-sud
donnent peu de résultats concrets, et les recommandations de l’ONU aux
pays développés de consacrer 1 % de leur PNB à l’aide au Tiers-monde restent
dans la plupart des cas sans effet. Les quelques résultats positifs concernent
les accords régionaux ou bilatéraux (accords de Lomé).
Conclusion :
La décolonisation s’est déroulé sous 2 formes
particulières : une manière pacifique (plutôt anglaise) et une manière
violente (surtout française).
Quoiqu’il en soit, plus de cinquante ans après Bandung, le
Tiers-monde est éclaté. Il n’y a plus un Sud mais des Suds
regroupant des pays aux situations économiques, sociales et politiques
différentes.
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