jeudi 16 février 2012

La vache et le prisonnier


La Vache et le Prisonnier est un film français réalisé par Henri Verneuil en 1959.

 

En 1943, Charles Bailly (Fernandel), prisonnier de guerre de la Seconde Guerre mondiale en Allemagne, décide de s'évader de la ferme où il est employé. Sa ruse, grossière et folle en apparence, consiste à traverser le pays, la vache Marguerite en laisse et un seau de lait dans l'autre main. Ainsi va commencer la plus extraordinaire des odyssées pour l'homme et la bête, paisible image de paix dans un pays déchiré par les haines et la violence. Après s'être séparé de l'animal, non sans lui avoir promis de ne plus jamais « manger de veau », il se dissimule sous un train pour franchir la frontière germano-française.

Alors qu'il se retrouve à la gare de Lunéville, il prend la fuite devant deux policiers français, et saute dans un train en partance pour... l'Allemagne. Ce n'est que deux ans plus tard que cet héroïque anti-héros reviendra, « comme tout le monde », de captivité.





Je crois bien que je n'avais pas vu ce film depuis presque 30 ans et pourtant je l'ai reconnu immédiatement. J'en connais tous les recoins. Comme j'ai dû le voir et le revoir plusieurs fois jadis et comme il est facilement impressionnant pour un petit enfant, je suppose que c'est ainsi qu'il s'est imprimé dans ma mémoire. Cela prouve au moins qu'il a de sérieux arguments à faire valoir en termes d'efficacité dans la transmission des émotions.

En effet, Henri Verneuil fait partie de ces artisans chevronnés qui, le mètre à la main, savent donner à leurs films les calibrages nécessaires, dans le cadre comme dans le temps. La mécanique de son cinéma est souvent très bien huilée, sans faute de goût. Quand il s'adjoint ici les services d'un scénariste-dialoguiste comme Henri Jeanson, sa mise en image apparait presque dilettante, non paresseuse mais un peu facile, se contentant d'accompagner les musiciens et l'enchainement des situations qui amènent Fernandel à se prendre d'affection pour une vache.
Pari gonflé, n'est-ce pas? Au départ cela n'a pas dû être évident de solliciter Fernandel ni des producteurs sur un sujet aussi foireux. Le fait que le scénario adapte une histoire vraie ne change rien au risque encouru dans cette entreprise : créer une authenticité et tirer des émotions d'une relation entre un soldat et une vache.

Le texte d'Henri Jeanson, pas uniquement sur la voix-off de Fernandel commentant son périple, ainsi que le jeu assez fin de Fernandel -le sujet se prête guère à la pantalonnade- parviennent à produire quelque chose d'assez épatant. Même aujourd'hui, je suis pris par l'émotion notamment quand le soldat est un temps hébergé par une famille allemande ou bien quand il abandonne sa vache pour traverser le Danube en barque.

C'est filmé avec simplicité, souvent, et une sincérité, toujours, qui gagnent le cœur du spectateur. Vraiment bien foutu. Le rythme est plutôt doux, sans agressivité et laisse au spectateur le temps de s'acclimater, d'entrer en empathie avec les personnages et au film d'installer une tension, soutenue, pas trop violente mais toujours présente, comme une épée de Damoclès.



Le film est une comédie amère, très humaniste, mais d'où une certaine tristesse semble perler. Une comédie avec un terrible arrière-goût de mort. Celle des hommes qui subissent la guerre, celle de l'amour, celle des illusions, des apparences, celles des idées (les allemands ne sont pas mono typés), celle du monde qui s'enfuit, une comédie sombre, à la Jeanson.

La musique de Paul Durand est parfaite, une ritournelle qui ne cesse de trotter dans la tête, où désespoir et larmes semblent sceller un accord tendre et désenchanté, harmonieusement, produisant presque un déchirement, un cri, une lamentation.
Et Verneuil reste fidèle au scénario, sans trahison. Et Fernandel livre une de ses meilleures prestations.

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