L’effondrement brutal du régime nazi est lié à la défaite en 1945. Au contraire l’URSS est confortée par la victoire et sa sortie du totalitarisme sera plus lente. Cependant, les racines de son effondrement n’en sont pas moins profondes.
I. Quelles sont les étapes de l’éradication du nazisme en Allemagne ?
A. Le procès de Nuremberg et la naissance d’une justice internationale
- Une priorité : Punir les coupables : Dès 1943 lors de la conférence de Moscou, les Alliés posent le principe du jugement des crimes nazis. Le procès se tient à Nuremberg, ville où se déroulaient les congrès du parti nazi, du 20 novembre 1945 au 1er octobre 1946. 22 dignitaires du régime sont jugés et pour la 1ère fois, le procès est filmé pour l’histoire. Les films tournés dans les camps sont montrés au monde entier.
- 4 chef d’accusation sont retenus : Plan concerté ou complot, crime contre la paix, crime de guerre et crime contre l’humanité (Défini à Nuremberg, c’est la violation délibérée et ignominieuse des droits fondamentaux d'un individu ou d'un groupe d'individus inspirée par des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux). Ce dernier est imprescriptible (Aucune limite de temps).Cette loi a posé la question d’une « justice des vainqueurs ». Cependant, le jugement est individuel, les accusés ont des avocats et les peines sont différenciées, principes de bases de la justice. Parmi les 22 accusés, 12 sont condamnés à mort, 3 à la prison à vie et 4 à des peines de 10 à 20 ans.
De nombreux procès de responsables nazis de rang moins élevés ont lieu par la suite (Pour les 3 zones occidentales d’occupation : 5 000 condamnations dont 800 à mort et 486 exécutées) et même de nombreuses années plus tard (Ex : Procès de Klaus Barbie à Lyon en 1987). Cependant, de nombreux criminels échappent à la justice.
- La naissance d’une justice internationale ? Après le procès de Nuremberg, celui de Tokyo de mai 1946 à novembre 1948, juge les criminels de guerre japonais. L’idée d’une justice internationale est inscrite dans la charte de l’ONU qui se dote en 1945 d’une Cour internationale de justice. Cependant la Guerre froide paralyse le système et il faut attendre 1993 pour que se mette en place le tribunal Pénal International pour la Yougoslavie. (TPIY). D’autre part, en 1998, est créé la Cour Pénale Internationale (CPI) pour juger les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité mais les EU, la Russie et la Chine ne la reconnaissent pas et dénoncent une possible atteinte à leur souveraineté nationale.
B. La dénazification de l’Allemagne
- La politique occidentale de dénazification : Décidée en même temps que la nécessité de juger les criminels nazis, la politique de dénazification se met en place. L’enjeu de l’occupation occidentale est d’installer durablement la démocratie.
Un travail de pédagogie est fait auprès de la population (Visites imposées de camps, documentaires…) et on décide de révoquer les fonctionnaires qui ont exercés une quelconque autorité pendant le III° Reich. Mais les alliés se heurtent rapidement à la réalité. En 1945, à Cologne, 18 spécialiste des eaux sur 21 ont appartenus au parti nazi (A Bonn, 102 médecins sur 112).
D’autre part, comme le souligne le Chancelier Konrad Adenauer, la prolongation de la dénazification risque de déboucher sur une réaction nationale.
- Pour les soviétiques, le nazisme est une manifestation du capitalisme. Pour le détruire il faut donc accélérer la mise en place du communisme et l’épuration touche surtout ceux qui ont tenu les leviers de commande de l’Etat et de l’économie (Industriels). La population est épargnée si elle se soumet à l’ordre nouveau.
- Des limites : Le début de la guerre froide remplace la volonté de punir par celle de reconstruire le pays face à la menace soviétique. En mars 1948, la dénazification prend officiellement fin
Les deux Etats allemands, nés en 1949, sont issus de la Guerre Froide. La RDA se définit comme un Etat antifasciste et une fois les responsables punis, elle estime ne plus avoir aucun lien avec le passé nazi. Pourtant beaucoup d’anciens de la gestapo rejoignent la Stasi, police politique de la RDA.
La RFA fondée sur des valeurs démocratiques met en place un système d’indemnisation des victimes du nazisme. En 1951, la loi réintègre dans la fonction publique 150 000 fonctionnaires écartés par les Alliés. Cependant le travail de sensibilisation de la population, le redressement du pays et son intégration dans le camp occidental enracinent définitivement la démocratie en Allemagne. Dans les années 60, la recherche des criminels est relancée (Procès Eichmann en1961, volonté de connaître le passé pour les jeunes générations)
II. Comment expliquer la fin plus tardive du totalitarisme soviétique ?
A. L’échec de la tentative de Khrouchtchev (1953-1964)
- Un changement de climat après la mort de Staline : L’URSS est un des grands vainqueurs de la 2nde guerre mondiale et une des deux grandes puissances de la Guerre Froide naissante. Il n’y a donc pas de remise en cause du régime. Après la mort de Staline en 1953, le pouvoir est partagé entre ses collaborateurs. Ils mettent en place une direction collégiale. Menacés eux-mêmes par les pratiques de Staline, ils décident une amnistie qui libère les prisonniers du Goulag (1 millions sur 2,5 millions). Le retentissement est immense en URSS car c’est la fin de la terreur de masse. Le 1er secrétaire du PCUS, Nikita Khrouchtchev, s’impose en quelques années à la tête du pays.
- Le XX° congrès du PCUS en 1956 : En février 1956, lors du XX° Congrès du PCUS, Khrouchtchev lit un rapport secret devant les délégués soviétiques. Il dénonce les crimes de Staline : Concept « d’ennemi du peuple » abandonné, dénonciation des purges et reconnaissance de la « déportation massive de plusieurs milliers de personnes ». Il explique aussi que Staline avait « renoncé à la méthode léniniste ». Cependant la répression de 1937/38 à laquelle participe Khrouchtchev est passée sous silence. Il n’évoque que la purge des cadres communistes. Enfin, le rapport ne reste pas secret longtemps.
- Des conséquences diverses mais limitées : Mais attention, il ne s’agit pas d’une démocratisation : Pas de remise en cause du système soviétique
La liberté d’expression est très limitée (Boris Pasternak est contraint à refuser le Nobel de littérature en 58 pour Docteur Jivago) et Khrouchtchev concentre les pouvoirs dans ses mains.
D’autre part la libéralisation ne touche pas les démocraties populaires (Intervention en Hongrie en novembre 1956)
A l’ouest, on constate une prise de conscience et certains intellectuels prennent de la distance (Démission du PCF d’Aimé Césaire)
Enfin, les réformes économiques sont un échec et la volonté de décentralisation de Khrouchtchev se heurte aux intérêts de la bureaucratie du parti.
Khrouchtchev est limogé en octobre 1964 par les cadres du Parti (Nomenklatura). Leonid Brejnev (1964-1982) s’impose peu à peu. La réforme économique s’enlise et les dissidents, pourchassés par le KGB sont envoyés en camp ou en hôpital psychiatrique. Ce n’est cependant pas un retour au stalinisme car la volonté de forger un homme nouveau à disparu. L’immobilisme l’emporte dans les années 1970 avec le vieillissement de la Nomenklatura (90% des membres du bureau politique ont plus de 60 ans)
B. Gorbatchev, de la Perestroïka à la désintégration de l’URSS (1985-1991)
- L’impossible restructuration de l’économie : En mars 1985, Mikhaïl Gorbatchev est nommé secrétaire général du PCUS. Conscient du délabrement du pays, il entreprend une réforme économique, la Perestroïka (Restructuration). Il ne s’agit pas d’instaurer le capitalisme (La référence de Gorbatchev reste Lénine) mais de débloquer un système marqué par la mauvaise qualité des productions et le manque de motivation des travailleurs : Assouplissement de la planification, autonomie des entreprises et création d’un secteur privé. Ces mesures fragilisent l’économie et leur application se heurte à la mauvaise volonté de l’administration.
- La Glasnost et les tentatives de démocratisation : Gorbatchev se rend vite compte que le parti est un obstacle à la modernisation. Il encourage donc la critique et abolit la censure. C’est la Glasnost (Transparence). Les médias abordent des sujets plus sensibles comme les privilèges de la Nomenklatura, les désastres écologiques de Tchernobyl. L’opinion publique réclame l’approfondissement du changement, y compris politique.
Gorbatchev modifie la Constitution et organise les 1ères élections libres lors des élections du Congrès des députés du peuple en 1989. Ce congrès procède à son élection comme président de l’URSS ce qui renforce sa légitimité.
- L’effondrement : Cependant, les réformes ne font que révéler les contradictions du système. On ne peut concilier économie planifiée et économie de marché. Les prix et le chômage augmentent alors que les pénuries perdurent.
D’autre part, les populations des démocraties populaires et celles des républiques qui composent l’URSS revendiquent libertés et autonomie.
En août 1991, les conservateurs organisent un putsch qui échoue. Toutes les républiques se déclarent alors indépendantes. Représentant d’un pays qui n’existe plus, Gorbatchev démissionne le 25 décembre 1991. (Remplacée par la CEI composée de 11 anciennes républiques)
Si le totalitarisme allemand s’effondre avec la défaite, la fin du totalitarisme soviétique est le résultat d’un processus interne commencé sous Khrouchtchev et qui s’accélère sous Gorbatchev. Si la fin peut sembler brutale et rapide, le totalitarisme soviétique s’est désagrégé lentement, sclérosé par une longue période d’immobilisme et un échec de l’économie.
Comme le disait Mikhaïl Gorbatchev le jour de sa démission : « L’ancien système s’est écroulé avant que le nouveau ait pu se mettre en marche ». Le totalitarisme soviétique n’existe plus mais la transition vers la démocratie libérale sera longue.
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