Coup de torchon est un film français réalisé par Bertrand Tavernier, sorti en 1981.
1938. En Afrique occidentale française. Lucien Cordier (Philippe Noiret) est l'unique policier d'une petite ville coloniale. Méprisé de tous pour sa lâcheté et sa veulerie, il est l'objet de moqueries et de railleries. Lorsque son officier supérieur lui fait prendre conscience de sa médiocrité, il va peu à peu se transformer en impitoyable assassin et se débarrasser de tous ses tourmenteurs, femme et maîtresse comprises par un jeu diabolique qui consiste à faire accuser d'autres que lui avant de les éliminer jusqu'à ce qu'il reste seul.
Ce film est adapté du numéro 1 000 de la Série noire, 1 275 âmes (Pop. 1280 en version originale) de Jim Thompson. Tavernier fait une transposition personnelle du récit de Voyage au bout de la nuit de Céline située dans l'Afrique coloniale à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Le film a été tourné au printemps 1981 dans le nord-ouest du Sénégal, notamment à Saint-Louis et aux environs de Louga.
Une très grande réussite de Bertrand Tavernier, qui adapte là un roman de Jim Thompson, avec brio. L'action est transposée en Afrique, plus particulièrement en AOF, et montre une vision tout à fait éloignée des clichés que l'on peut avoir sur la période. Les personnages sont tous méprisables d'une certaine façon, et eux même semblent être les premiers à s'en rendre compte, tout du moins ont-ils l'air de se demander ce qu'ils font là. Ainsi leurs comportements en pâtissent et ils ne font plus aucune concession. On croirait les voir évoluer dans un monde parallèle, tant ils semblent privé de sentiments (à l'exception peut-être de l'institutrice, que Noiret met en garde). Les personnages sont tous à l'image du principal (le policier), ils subissent leurs vies.
Loin des clichés sur les français colonisateurs vivant dans l'abondance et la joie, tous semblent ici s'ennuyer et aspirer à une autre vie (Stéphane Audran ne rêve que d'aller sur la Côte d'Azur, Eddy Mitchell veut s'engager). Pas de manichéisme, tout le monde a ses bons et ses mauvais côtés, et jamais on ne cherche d'excuses à leurs médiocres actions. Si terribles qu'elles soient, elles ne surprennent pourtant jamais. Le monologue raciste de Guy Marchand ne choque pas, les assassinats froids de Philippe Noiret coulent de source, l'attitude de Isabelle Huppert est presque défendable, on a de la compassion pour Stéphane Audran. Tout se déroule comme dans un western crépusculaire - de plus, le décor s'y prête.
L'interprétation est à la hauteur de l'histoire : Philippe Noiret est magistral dans son personnage énigmatique, Isabelle Huppert généreuse, Stéphane Audran très drôle (tout comme Eddy Mitchell dans un rôle inattendu), Jean-Pierre Marielle en état de grâce et Guy Marchand tout à fait à l'aise. La mise en scène est comme toujours très travaillée et s'adapte à l'action (dans la précipitation de la déclaration de guerre, il nous offre par exemple un superbe plan séquence), autant que la musique de Philippe Sarde qui prolonge et accompagne ce qu'on voit à l'écran. Les séquences finales, l'apothéose de Philippe Noiret, sont d'anthologie. Nous ne sommes pas loin de la claque cinématographique.
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