Comme son homologue totalitaire Joseph Staline, Hitler vivait, surtout pendant la guerre, en reclus et en décalage temporel, menant dans ses divers QG une vie morne, monotone et essentiellement nocturne, dont il imposait l'ennui à tout son entourage.
Avant de s'y terrer après 1941, notamment à la « Tanière du Loup » ou Wolfsschanze vers Rastenburg (il est toujours officiellement domicilié à Munich) et plus encore, il aime à satisfaire son goût romantique pour les montagnes à sa résidence secondaire alpine de Berchtesgaden, le Berghof, doublée du panoramique Nid d'aigle. Sur l'Obersalzberg viennent aussi habiter quelques-uns de ses principaux courtisans et intimes.
Selon certaines sources, Hitler ne buvait ni ne fumait (le tabac était rigoureusement proscrit en sa présence), mangeait végétarien au moins depuis 1932 et sa vie sentimentale et sexuelle était réduite au strict minimum. Se présentant à son peuple comme mystiquement marié à l'Allemagne, pour justifier et instrumentaliser son célibat, il a caché aux Allemands l'existence d'Eva Braun pendant toute la durée du Troisième Reich, négligeant souvent celle-ci et lui interdisant de paraître en public voire de venir à Berlin, et la confinant le plus possible en Bavière. Sa jeune nièce Geli Raubal, avec laquelle il avait eu une liaison, s'était suicidée en 1931 dans sa chambre de Munich. Pour Ian Kershaw, en choisissant des femmes nettement moins âgées que lui (16 ans de moins dans le cas d'Eva Braun), et en conservant la distance (sa future épouse d'un jour ne devait l'appeler que mein Führer), Hitler s'assurait de pouvoir garder intacte sa domination narcissique et égoïste sur elles. De nombreuses rumeurs ont couru sur sa sexualité, du fait notamment de son absence de vie sentimentale officielle, faisant courir le bruit d'une asexualité ou d'une homosexualité. On lui a prêté des pratiques sexuelles déviantes. D'autres rumeurs le déclaraient impuissant. Après la guerre, la révélation d'un rapport d'autopsie soviétique réalisé en 1945, dont le caractère scientifique a été contesté, a répandu l'histoire qu'il n'avait qu'un testicule. Mais il s'agirait plutôt d'une légende urbaine, car le médecin de famille d'Hitler, le docteur Eduard Bloch, a affirmé sans équivoque qu'il avait examiné Hitler pendant son enfance et l'avait trouvé « génitalement normal ».Cette légende n'a cependant aucun rapport avec la chanson anti-allemande « Hitler has only got one ball » (« Hitler n’a qu’une couille », sur l’air de la Marche du Colonel Bogey), populaire pendant la guerre.
Solitaire et sans amis, Hitler a toujours été incapable dès sa jeunesse de laisser transparaître le moindre sentiment de compassion ou d'affection réelle pour personne, réservant ses quelques accès de tendresse à sa chienne Blondi, un berger allemand. Son égoïsme sans complexe, sa conviction d'être infaillible et sa soif de domination se traduisaient au quotidien par le refus de toute critique et par ses interminables monologues, ressassant éternellement les mêmes thèmes des heures durant, et épuisant son entourage jusque très tard dans la nuit.
Cela ne l'empêchait pas de régner sur son entourage et sur les masses par son charisme et son indéniable talent de séduction, et d'inspirer des dévouements aveugles allant jusqu'au fanatisme. Les célèbres colères effroyables qu'il pouvait piquer, contre ses généraux notamment, n'étaient en réalité pas très fréquentes, et survenaient surtout quand la situation échappait à son contrôle.
Les images célèbres de l'orateur Hitler en train de vociférer ou d'éructer avec force gestes frénétiques ne doivent pas non plus donner une idée réductrice de ses talents propagandistes. En réalité, avant d'en arriver à ces points d'orgue fameux qui électrisaient l'assistance, Hitler savait varier les tons, construire sa progression et doser son débit, lequel ne s'accélérait que graduellement.
Autodidacte, son instruction hâtive a toujours laissé à désirer. Ses bibliothèques à Munich, Berlin et Berchtesgaden contenaient plus de 16 000 volumes dont peu d'ouvrages authentiquement scientifiques ou philosophiques. Il a persécuté Freud (décimant aussi sa famille), et a déformé grossièrement la pensée de Nietzsche afin de mieux faire cadrer ses lectures avec son idéologie personnelle. Il ne connaissait aucune langue étrangère, son interprète attitré Paul Schmidt se chargeant de lui traduire la presse extérieure ou l'accompagnant dans toutes les rencontres internationales. En outre, des employés devaient présenter des lunettes partout dans la chancellerie du Reich, afin qu'Hitler ait rapidement une à la main.
Prompt à exalter et à embrigader le sport, il ne faisait jamais le moindre exercice de culture physique.
Incapable de se contraindre au travail régulier et suivi depuis sa jeunesse bohême de Vienne, le « dictateur paresseux » (Martin Broszat) n'avait pas d'horaires de travail fixes, négligeait souvent de réunir ou de présider le conseil des ministres, était parfois longuement introuvable même pour ses secrétaires, et ne faisait le plus souvent que survoler les dossiers et les rapports. Au contraire du très bureaucratique Staline, Hitler détestait la paperasserie, et n'a de sa vie rédigé qu'un seul memorandum, celui sur le Plan de Quatre Ans (1936), qu'il n'a d'ailleurs fait lire qu'à deux ou trois personnes dont Göring et le chef de l'armée Von Blomberg. Ses directives étaient souvent purement verbales ou rédigées en des termes assez généraux pour laisser à ses subordonnés une assez grande marge de manœuvre.
Détaché du catholicisme dès son enfance, et devenu un doctrinaire antichrétien, Hitler n'a jamais assisté à une cérémonie religieuse de toute sa vie politique, même s'il faisait souvent référence en public à une vague « Providence » dont il se sentait l'instrument. Malgré des tracasseries et des surveillances, il a toujours eu l'habileté de ménager globalement les Églises allemandes, évitant un conflit ouvert dangereux pour l'adhésion des populations à sa personne. Ni lui ni ses partisans n'ont jamais été excommuniés, et l'encyclique antinazie du pape Pie XI, Mit Brennender Sorge (1937), évite prudemment de mentionner le nom d’Hitler. Cyniquement, Hitler n'a jamais rédigé de déclaration de sortie de l'Église catholique et se prêtait à la simagrée de continuer à payer ses impôts d'Église.
Sa santé n'a cessé de se dégrader dans les dernières années de la guerre. Déprimé et insomniaque, vieillissant, voûté et tremblant (peut-être atteint sur la fin de la maladie de Parkinson), bourré de médicaments par son médecin le Dr. Theodor Morell, Hitler était surtout absorbé par les opérations militaires et hanté en son sommeil, de son propre aveu, par la position de chacune des unités détruites sur le front de l'Est. C'est bien avant de passer à l'acte qu'il évoquait devant ses proches le suicide comme la solution de facilité qui permettrait d'en finir en un instant avec ses ennuis.
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